Le « deuxième effet Kiss Cool » ...

... des actions en faveur des oiseaux des champs mises en place
dans la plaine de Perwez-Thorembais

La plaine agricole au nord de Perwez fait l’objet d’une attention particulière depuis plusieurs années. Agriculteurs, scientifiques et naturalistes se sont associés pour mettre en place des aménagements en faveur de la biodiversité dite agricole. Voilà une belle initiative qui va permettre de donner un bon coup de pouce à la nature dans un milieu où elle en a bien besoin ... mais ce ne sera pas le seul effet positif pour l’environnement ! Allons voir ...

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Perdrix grise  Mc8a : bande aménagée pour la faune
Busard cendré 

La plaine de culture de Perwez-Thorembais est une des rares en Wallonie où tous les oiseaux qui nichent au sol dans des champs sont encore présents à la bonne saison. En plus des alouettes, cailles des blés, bergeronnettes printanières et autres perdrix grises, la plaine compte une petite population d’une douzaine de couples de bruants proyers. Ce dernier, comme la perdrix, ne vit que dans les parcelles agricoles où il niche au sol. Les deux espèces, en forte régression (- 90 % en 30 ans), sont au centre du projet. Ces oiseaux présentent aussi les particularités de ne pas quitter notre région à la mauvaise saison et de rester dans la même zone d’une année à l’autre pour se reproduire.

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Bruant proyer 

Présentation générale du projet

L’objectif majeur de ce projet expérimental est de mettre en œuvre des aménagements à l’échelle d’une plaine de culture pour favoriser les oiseaux des champs. Il se déroule sur plusieurs années dans le cadre du programme agro environnemental de la Politique Agricole Commune Européenne. Le projet vise également à tester de nouvelles mesures et à évaluer leurs effets à travers un suivi scientifique et agricole.

Les aménagements sont destinés à améliorer la capacité d’accueil du milieu pour les oiseaux, surtout en apportant des ressources alimentaires comme des graines de froment à la mauvaise saison et des insectes à la bonne saison. Des zones de hautes herbes sont aussi prévues pour favoriser l’installation de nids au sol à leurs abords comme c’est particulièrement apprécié par le bruant proyer et la perdrix grise.

En pratique, les aménagements consistent principalement en :

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 Phacelie Phacelie detail  Moutarde

À terme, les aménagements devraient couvrir au moins 3 % de la surface de la plaine pour avoir un effet significatif et durable sur le nombre d’oiseaux agricoles. Le suivi scientifique des populations permettra d’évaluer l’efficacité des actions sur la reproduction et l’augmentation des effectifs des différentes espèces.

Protection des eaux de surface

Même si l’objectif principal de ces aménagements, on l’aura compris, est de favoriser les conditions de vie de la biodiversité aviaire sur la plaine, les acteurs de l’eau que nous sommes tous au sein du Contrat de rivière, impliqués dans la préservation des eaux de surface, peuvent aussi voir d’un bon œil le déploiement de ces bandes, parcelles et autres buissons. Là-bas, il n’y a pas nécessairement de cours d’eau au sens strict du terme, la zone d’étude étant grosso modo située dans le quadrilatère entre le RAVeL, la Nationale 243, N29 et N91 (villages exclus). Par contre, on y retrouve tout un réseau de fossés et autres drains qui in fine conduisent les eaux de ruissellement vers la vallée du Thorembais au nord et de la Grande Gette au sud (cf carte). Lors des épisodes orageux, une certaine quantité de terre peut même également être arrachée du plateau et dévalée dans lesdites vallées, directement ou en passant par la case infrastructures routières. Les conséquences en sont bien souvent désastreuses, tant pour les sinistrés bien sûr que, durablement pour l’écosystème rivière (altération qualitative, envasement, réductions des capacités d’accueil pour la vie aquatique). On a donc tendance à l’oublier, mais la protection de nos ruisseaux et rivières passent aussi et largement par un bon aménagement du parcellaire agricole sur les plateaux et dans les plaines.

CartePerwez

La mise en place et la création d’un certain maillage extensif, enherbé le plus souvent, au sein de la matrice agricole va donc concourir à limiter l’impact négatif 1. des orages et 2. de certaines pratiques agricoles :

  1. La couverture herbeuse va réduire la force d’impact de la goutte de pluie, limitant ainsi le détachement des sédiments et leur mise en suspension et la rugosité du couvert va permettre de réduire la vitesse d’écoulement de l’eau, sa force érosive, et favoriser ainsi le dépôt des particules terreuses. Plus ces éléments seront nombreux dans le paysage, plus ils intercepteront le ruissellement avant qu’il ne se concentre, plus ces phénomènes limitatifs seront répétés, moins l’eau aura donc de vitesse, de potentiel érosif et de capacité de transporter la terre jusqu’au cours d’eau. En ralentissant l’eau, le temps d’infiltration sera aussi plus important.
  2. Toutes ces surfaces extensives sont autant d’hectares soustraits aux pratiques intensives et à l’application d’intrants. En outre, ces structures vont aussi concourir à limiter les effets de dérive et donc réduire les arrivées de pesticides et autres engrais dans les eaux de surface et/ou souterraines. Au final, c’est la structure du sol en elle-même qui en bénéficiera et donc la capacité d’infiltration et de rétention des eaux de ruissellement.

Sur la zone expérimentale de Perwez, un bon exemple d’aménagement en faveur de la biodiversité pouvant également avoir un effet positif dans le cadre de la lutte contre le ruissellement hydrique est la bande aménagée dite « Mattart » Mattart
  Photo : UCL

Photo9 Située dans le coin est du site, sur Petit-Rosières (Ramillies), au droit d’un axe de ruissellement concentré récurrent, cette bande aménagée va permettre, outre l’aspect refuge et nourricier pour la petite faune, de casser l’élan du ruissellement en freinant sa vitesse et en piégeant un maximum de particules terreuses. Photo8
Lièvre   Faisan

Dans le détail, son installation à cet endroit a été mûrement réfléchie et calculée pour couper l’axe de ruissellement avant qu’il n’atteigne une valeur critique de 18 ha.

Carto1 Carto2
Photos : UCL

On le voit, même si on n’y aurait pas nécessairement pensé de prime abord, l’amélioration de la qualité de nos eaux et la lutte contre les inondations passent donc aussi par un aménagement raisonné et équilibré de la plaine agricole !
Espérons que ce projet expérimental fasse des petits ...

Photo10 jeune busard cendre
Jeune busard cendre

Acteurs et partenariat

Les agriculteurs sont donc les principaux acteurs du projet. Les aménagements réalisés font l’objet de contrats agricoles (type MAEC2 ou autres) avec le Service Public de Wallonie pour indemniser certains coûts et apporter un soutien technique car ils nécessitent un effort de gestion important souvent sur leurs meilleures terres. Des démarches sont en cours pour impliquer aussi les chasseurs qui apprécient l’effet favorable des actions sur la faune sauvage. L’association de protection de la nature Natagora est également impliquée dans le suivi scientifique et le financement de certains aménagements. Natagriwal est aussi partie prenante en apportant un appui financier, scientifique et technique pour l’encadrement des agriculteurs. La Commune de Perwez soutient les actions et adapte l’entretien des accotements. L’ensemble du projet est coordonné par l’Université Catholique de Louvain.

Personnes de contact :

• Thierri Walot (UCL ELI Agronomie) - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.. 0476 79 21 17. www.graew.be
• François-Xavier Warnitz (Natagriwal) - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.. 0499 67 04 99. www.natagriwal.be
• Arnaud Laudelout (Natagora) - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.. 0495 16 71 35. www.natagora.be

1 Cultures à base de moutarde, avoine ou phacélie, semées après les récoltes d’été, servant à protéger les ressources en sol et en eaux.

2 Les Méthodes Agro-Environnementales et Climatiques sont des pratiques agricoles visant à améliorer fortement les différents composantes de l’environnement (eau, sol, biodiversité, climat), les paysages ruraux et le patrimoine animal ou végétal. Il s’agit de contrats volontaires de 5 ans passés avec les agriculteurs.

Sauf indications contraires, photos de Jérémie Guyon