Contrat de rivière Dyle-Gette

vendredi 26 avril 2024

Les PARIS, pour une gestion intégrée et sectorisée des cours d’eau

Non, il ne s’agit pas de la capitale française. Quel est le pari des PARIS ?  Instaurer des Programmes d’Actions sur les Rivières par une approche Intégrée et Sectorisée.
Késako ?
Le but : passer d’une gestion « hydraulicienne » (l’eau doit s’écouler le mieux possible) à une gestion intégrée (reprenant l’ensemble des fonctions de la rivière : économiques, environnementales, de tourisme, hydrauliques) en affectant un enjeu prioritaire à chaque longueur homogène (ou secteur) du cours d’eau.

L’idée est la suivante : telle longueur du cours d’eau, sur « x » km, est essentielle pour gérer les crues, parce que, par exemple, la zone humide contigüe peut jouer un rôle primordial de zone d’expansion de crues ; par contre, telle autre longueur, sur « y » centaines de mètres, est un paradis de biodiversité, absolument à préserver parce que devenu rare dans la région. Il est évident que l’on ne va pas gérer ces deux « secteurs » de la même manière, comme cela se faisait jusqu’à présent.

La Direction des Cours d’Eau Non-Navigables (DCENN – DGO3) de la Région wallonne a été chargée de l’élaboration et de la mise en œuvre à l’horizon 2013 de ces PARIS, sortes de plans de gestion du linéaire des cours d’eau, dans le contexte plus large des plans de gestion imposés par la Directive-cadre sur l’Eau et par la Directive inondations.

Après une phase de mise au point de la méthodologie et du découpage du linéaire des cours d’eau en unités de gestion homogènes (les « secteurs ») en collaboration avec la Faculté de Gembloux de 2008 à 2010, l’application de la méthodologie au sous-bassin de la Lesse a commencé en 2010, en partenariat avec les gestionnaires impliqués.

carte1
Exemple de cartes par secteur pour le secteur Lesse021

Nous sommes maintenant passés à la 2e phase qui consiste à utiliser cette méthodologie et à étendre la cartographie de la sectorisation à l’ensemble du territoire wallon, quelle que soit sa catégorie. Cette phase est essentiellement basée sur le travail de la Faculté de Gembloux et sur les propositions de chaque gestionnaire concerné : Région et Provinces. La Faculté a réalisé une proposition de sectorisation sur l’ensemble des cours d’eau, proposition qui est maintenant à l’étude au sein de la Région et des Provinces. Actuellement, les 12.700 km de cours d’eau classés sont sectorisés (100 %) et 38 % ont été validés. La longueur moyenne d’un secteur varie de +/- 2 à 4 km selon la catégorie

Les PARIS ont pour objectif d’intégrer, dans le temps (planification) et dans l’espace (tous les cours d’eau wallons publics sont concernés, quels que soient leur taille et leur gestionnaires), l’ensemble des mesures de gestion spécifiques du linéaire de ces cours d’eau (lit mineur et berges) en fonction des enjeux prioritaires identifiés (économiques, écologiques et sociaux) à l’échelle d’unités de gestion homogènes appelées secteurs.

Les PARIS, 5 lettres,  5 concepts :

-      Programmes d’Actions, plutôt que ‘plans de gestion’ afin d’éviter les confusions avec les 2 plans de gestion légaux et obligatoires dans lesquels les PARIS s’inscrivent :

  • plans de gestion par district hydrographique - PGDH (imposés par la Directive-Cadre sur l’Eau), dont l’unité de gestion de base est la masse d’eau (par exemple, il y a 13 masses d’eau dans le sous-bassin Dyle-Gette) ;
  • plans de gestion du risque inondation (imposés par la Directive Inondation).

-      Actions spécifiques du linéaire des cours d’eau (essentiellement lit mineur + berges), qui touchent à l’hydromorphologie.

-      Rivières au sens large : englobe tous les cours d’eau publics, des navigables aux non navigables toutes catégories confondues, ce qui implique d’instituer en règle la concertation et la coordination entre gestionnaires.

-      par une approche Intégrée, qui intègre :

  • toutes les catégories de cours d’eau publics et leurs gestionnaires respectifs,
  • les différents enjeux et usages des cours d’eau : non seulement protection des biens et des personnes et économie, mais aussi enjeux écologiques (protection de la nature) et socio-culturels (kayak, camping, pêche, baignade, patrimoine, paysage,…)
  • les politiques, réglementations et plans de gestion existants en la matière, notamment les plans de gestion par district hydrographique qui fixent, pour chaque masse d’eau, un état des lieux initial (2008) et un objectif environnemental à atteindre à l’horizon 2015.

-      par une approche Sectorisée, basée sur un découpage du linéaire des cours d’eau en secteurs physiquement homogènes par Gembloux Agro Bio Tech (Faculté de Gembloux, Unité de Gestion des Ressources Forestières et des Milieux Naturels).

Chaque secteur (unité de gestion de base des PARIS) se voit définir par les gestionnaires :

  • un ou des enjeux prioritaires,
  • des objectifs de gestion,
  • un programme d’actions sur 6 ans pour atteindre ces objectifs.

En d’autres termes, on peut dire que les PARIS sont à la croisée de deux types de plans de gestion légaux et obligatoires dans lesquels les PARIS s’inscrivent :

  • les plans de gestion de district hydrographique (PGDH) imposés par la Directive-cadre sur l’Eau, en cours de finalisation en Région wallonne (devaient être élaborés pour fin 2009), qui fixent pour chaque masse d’eau un état des lieux évalué en 2008, un objectif environnemental à atteindre à l’horizon 2015 (le ‘bon état’ écologique, de manière générale) et un programme de mesures visant à atteindre cet objectif.
  • les plans de gestion du risque inondation (PGRI) imposés par la Directive Inondations (à élaborer pour fin 2015). Cette directive nous impose une procédure de mise à jour du plan PLUIES (zones d’aléas inondations)

paris

Ces deux sortes de plans de gestion couvrent une période de 6 ans (seront revus en 2015 la première fois, puis en 2021, etc). Ils doivent en outre faire l’objet de rapports périodiques à l’Union Européenne. A cette fin, un réseau de placettes de surveillance permet de suivre la qualité (ou plutôt les qualités : physico-chimique, biologique et hydromorphologique) des cours d’eau wallons, et d’en rendre compte à l’Union Européenne.

Par contre, les PARIS reprennent uniquement les mesures de gestion spécifiques du linéaire des cours d’eau ; ils couvriront également une période de 6 ans, et devront converger vers les objectifs environnementaux par masse d’eau fixés par les plans de gestion de district hydrographique.  Ils doivent toutefois rester suffisamment flexibles et ménager une marge de manœuvre suffisante aux gestionnaires pour faire face aux imprévus (crues exceptionnelles, pollution majeure, tempête, agent pathogène émergeant particulièrement virulent qui décimerait une des espèces de la ripisylve, …).


On distinguera 4 enjeux principaux pour les secteurs de cours d’eau :

-       l’enjeu ‘protection des biens et des personnes’ (mission ‘classique’ de base des gestionnaires des cours d’eau).
Cet enjeu recouvre la protection des biens et des personnes contre les inondations et l’érosion des berges : habitations, entreprises, industries, zonings, ponts, voiries, infrastructures diverses (stations d’épuration, stations de pompage, infrastructures touristiques), parcelles agricoles, …

-       l’enjeu ‘économie’, en lien avec la présence directe du cours d’eau, et qui vaut surtout pour les voies navigables et les gros cours d’eau non navigables.
Exemples : transport fluvial, activités logistiques (ports intérieurs, zones de transbordement, …), production d’hydroélectricité, prélèvement d’eau de surface pour les besoins de l’industrie ou pour potabilisation,…

-       l’enjeu ‘protection de la nature’, en lien avec la préservation ou la restauration d’habitats menacés ou représentatifs de la biodiversité en Europe, le maintien ou l’atteinte du bon état écologique des cours d’eau (biologique, hydromorphologique, physico-chimique).
Ainsi, la renaturation de berges, la préservation ou gestion ou restauration des ripisylves d’essences indigènes, la reméandration de cours d’eau, l’effacement d’ouvrages infranchissables ou l’installation de passes à poissons afin d’assurer la libre circulation des poissons, sont autant de mesures qui relèvent de cet enjeu.
MethodoSectorisation
Exemple de protection de la nature : reméandration de l’Eau Blanche à Boussu-en-Fagne

-       l’enjeu ‘tourisme et loisirs’ : pêche, navigation de plaisance, tourisme, baignade, kayak, camping, patrimoine bâti sur ou en bordure de cours d’eau …
Dans certains cas (ex : exploitation intensive de parcours de kayaks), cet enjeu peut être combiné à un enjeu économique fort.

Signalons enfin que, parallèlement à la mise en œuvre des PARIS, PGDH et autres PGRI, la Région wallonne a commandité un travail d’assistance juridique afin de modifier, compléter et rendre cohérente la base décrétale de la gestion des cours d’eau, navigables ou non, et des wateringues. L’objectif est aussi d’intégrer ces nouvelles obligations européennes dans la législation wallonne et d’assurer la cohérence entre PARIS, PGDH et PGRI.

Ainsi, le cadre dans lequel s’inscrit la gestion des cours d’eau est en train de changer de fond en comble. Le métier de gestionnaire des cours d’eau devient tout autre. Il s’agit de s’y préparer.

NB : Cet article a été rédigé sur base de 2 articles de la DCENN, que nous remercions.

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