L'assainissement durable...des eaux usées, il s'agit là d'une thématique pour certains nouvelle et cependant déjà largement traitée. L'assainissement durable c'est penser autrement la façon d'éliminer les déchets de notre « petite personne » notamment en les valorisant.
Il sera le sujet de notre « feuilleton 2012 » avec en guise d'introduction : un billet d'humeur dont la ligne principale nous a été communiquée par le tout jeune réseau de l'assainissement durable qui s’est mis en place à l’issue des 3 colloques organisés par l'asbl «Exposant D».
L'objectif de ce sujet : étendre vos connaissances pour vous permettre de vous ouvrir à une vision différente « du durable » tout en gardant à l'esprit les efforts entrepris et qui le seront encore par les opérateurs.
Quelle définition donner à l'assainissement durable ? « L'assainissement » se conçoit aisément : c'est l'épuration de nos eaux usées, et au-delà c'est rendre au milieu des produits de qualité (eaux et/ou boues) issus de nos déchets. Mais le durable ? Si un de nos lecteurs se revendique d'un assainissement non durable, qu'il se manifeste. Sa franchise mérite le respect. L'époque veut cela : nous mangeons, nous respirons, nous produisons et bien sûr nous déféquons tous durable, ad nauseam.
Parler de durable à tous vents signifie-t-il qu'avant on faisait du non durable ? Avant ... Avant les années 1990, il n'y avait pas ou peu d'épuration des eaux; elles étaient directement rejetées dans nos cours d'eau sans traitement. La mise en route du programme d'assainissement impulsée par la directive européenne 91/271 était en soi porteuse de durabilité puisqu'en éliminant le carbone, l'azote et le phosphore, on préservait la qualité de nos rivières. Les poissons pouvaient à nouveau s'ébattre joyeusement dans l'onde fraiche... Jusqu'à ce que nos scientifiques s'aperçoivent que ces petits animaux aquatiques jouaient de plus en plus à la poupée ! La féminisation des alevins était réalité. Ce phénomène est du à la dissémination dans l'environnement de molécules qui altèrent les systèmes hormonaux (les perturbateurs endocriniens, dont les résidus médicamenteux, les plastifiants, les hormones des pilules contraceptives, ...).
Les temps sont donc à nouveau difficiles pour l'assainissement et plus encore pour le durable. Éliminer les perturbateurs endocriniens sera l'un des défis des prochaines années et c'est un bon exemple pour s'attaquer aux critères de durabilité.
Tout d'abord : la seule bonne pollution est celle que l'on ne produit pas. La première action est donc à la source. Une dynamique qui est certes en contradiction avec les objectifs sociétaux affichés de production/croissance (avec l'autorisation de la publicité pour les médicaments par exemple). A défaut, il faudrait déployer un arsenal technologique coûteux et énergivore (exemple : charbon actif et/ou ozonation) pour éliminer les perturbateurs en sortie de station d'épuration, solution peu en phase avec une démarche globale durable.
L'assainissement contemporain ne produit pas que de l'eau propre, il transforme la pollution en boue d'épuration (mélange de résidus organiques, de biomasse microbienne et de matières minérales). La question est : que faire de ces boues ? Le retour à la terre boucle un cycle, fertilise et amende le sol : du durable à l'ancienne, conceptuellement irréprochable s'il n'y avait des risques de contamination en micropolluants (métaux lourds et composés traces organiques évoqués ci-avant) véhiculés par les eaux et concentrés dans les boues. C'est donc évitable, comme dit précédemment, par une stratégie d'action à la source et par des contrôles : les meilleures boues vont alors à l'agriculture et le reste ... au four. On en tirera tout de même un peu de chaleur.
Une évolution qualitative pour un retour à la terre sera de croiser des flux complémentaires dans un compost : boues d'épuration et déchets verts/cellulosiques.
Actions à la source, frugalité de la pollution, énergie épargnée, bouclage de cycle, vue globale des impacts environnementaux, coût : quelques critères d'une meilleure durabilité de l'assainissement se dévoilent au détour de discussions animées que peuvent avoir les passionnés de l'étron.
L'assainissement est-il uniquement une histoire d'eau ? Même les plus mous concèdent que se soulager dans l'eau potable est une absurdité environnementale et économique. Les intégristes de la crotte - ou les sages, selon les points de vue - osent affirmer que poser son cadeau dans l'eau est tout simplement du gâchis : une bonne litière au fond d'un seau placé sous le trône, un compost au fond du jardin et le tour est joué, on mange de la bonne salade tout l'été. Attention aux pathogènes rétorquent les détracteurs qui soulignent à juste titre un des fondements historiques de l'assainissement. La toilette sèche demande un minimum de savoir faire – mais est-ce un mal ? – et bouleverse les habitudes culturelles.
L'eau (de pluie de préférence, durabilité exige) reste toutefois le véhicule privilégié de nos fèces (eaux noires), et l'agent du nettoyage de nos corps musculeux et de nos maisons (eaux grises). Les habitants en zone d'épuration autonome – non raccordés à une station d'épuration collective – ont le privilège du choix : microstations, lagune bucolique, filtre planté de roseau, lit bactérien, fibre de coco, ... Le monde de l'épuration est dynamique et acceptera encore dans la famille de nombreuses évolutions, plus ou moins durables.
Mais avant d'être durable, l'assainissement doit être effectif. Et pour cela remplir au moins deux conditions :
- la qualité du rejet (performances épuratoires), définie idéalement en fonction du milieu récepteur, de ses capacités auto-épuratrices et des objectifs de qualité des masses d'eau (directive cadre Eau) ; des normes sont édictées dans le code de l'eau ;
- la maîtrise des risques sanitaires.
Quels sont alors les systèmes « durables » ? Comment les classer ? Quelle durabilité leur accorder ? Faut-il simplement s'en remettre au bon sens ou engager une démarche analytique ? Les deux sont compatibles et le débat est ouvert. La difficulté principale de l'analyse réside dans la pondération à attribuer aux critères pour dégager une échelle de durabilité – et pas un classement manichéen entre systèmes/stratégies durables et non durables. Nous présentons ci-après des critères de durabilité, sans les hiérarchiser :
- économie en eau (en amont de l'assainissement),
- économie en énergie (pompage et aération principalement, mais aussi l'énergie grise),
- économie en matière (matériaux de construction, réactifs, ...),
- valorisation des sous produits, bouclage de cycle court,
- coût supportable,
- simplicité de mise en œuvre, entretien et gestion,
- robustesse, dépendance technologique réduite au minimum,
- autonomie,
- durée de vie du système élevée,
- espace nécessaire réduit (dans le contexte wallon),
- implication du citoyen,
- ...
Il est intéressant d'ajouter qu'avec ces qualités, le durable se doit de traverser avec intégrité les aléas futurs : changements en tous genres, politiques, sociaux, climatiques, crise énergétique, mouvement de population, etc.
On peut citer parmi les différents systèmes : filière des toilettes sèches (à litière biomaîtrisée, à lombri-compostage, à séparation à la source,...), procédés aqueux simples, filtres à sable, filtres plantés, lagunage, lit bactériens, biodisques, boues activées en microstation ou en épuration collective, biofiltres ... Soyons attentifs à la complexification des filières qui rime moins avec durabilité.
On peut aussi envisager l'épuration « à la parcelle », grouper les habitations, développer des stratégies qualitatives de valorisation des sous-produits comme les centres d'imprégnation (compostage d'un mélange de gadoues de fosses septiques ou d'eaux noires avec des déchets cellulosiques), et dans ce cas ne devoir plus traiter que des eaux grises suivant différentes filières...
Au-delà du seul procédé d'épuration, c'est la filière entière qui doit être labellisée « plus ou moins durable », une action en amont est donc nécessaire ainsi qu'une valorisation des sous-produits se doit d'être incluse. Pour revenir à l'exemple des micropolluants organiques, adsorbés préférentiellement sur les boues d'épuration, un compostage bien mené conduit à l'élimination de la majorité de ces molécules. Bien que d'une approche technocratique parfois dérangeante, la démarche des analyses de cycle de vie (ACV) est un outil intéressant pour juger des impacts environnementaux intervenant dans l'estimation de la durabilité d'une filière.
L'échelle de l'assainissement est aussi un critère de durabilité : à partir de quelle densité d'habitation vaut-il mieux regrouper les effluents pour les traiter ? Les PASH (Programme Assainissement par Sous-bassins Hydrographiques) ont défini les zones en assainissement collectif et celles en assainissement autonome. Et dans ces dernières, il est aussi possible d'envisager de l'épuration groupée, ce qui sera peut-être facilité « administrativement » par la création du SPAA (Service Public d'Assainissement Autonome).
Espérons alors que le durable soit durablement, intelligemment encadré et promu par les pouvoirs publics, que ce critère intervienne dans les procédures d'agréments des systèmes d'épuration, que des actions de sensibilisation soit menées auprès du public, que tous les acteurs concernés soient suffisamment impliqués et formés, ... sans oublier les indispensables contrôles. Bref, que le durable existe sous la peinture verte.
Enfin le durable c'est aussi l'enthousiasme, l'inventivité et l'ingénierie écologique. Des concepts, des essais, des applications éclosent un peu partout dans les mains de passionnés, et pas seulement en Wallonie. Nous les décrirons dans la suite de ce feuilleton.
Pour plus d'info, contact Exposant D : Olivier Chaput - Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
http://www.exposantd.be/
Des sites web à visiter :
- le site de Joseph Orszàgh : www.eautarcie.org
- le site de Pierre « L'Écoleau » : www.ec-eau-logis.info/
- son forum de discussion : www.ec-eau-logis.info/forum/
- sa page Facebook et ses vidéos : www.facebook.com/ec.eau.logis
- alliance pour l'assainissement durable www.susana.org/
- le système « Epuvaleau » issu de la faculté agronomique de Gembloux : www.epuvaleau.eu
- les systèmes d'épuration par lagunage de l'ASBL « Écologie au Quotidien » : www.lagunage.be
- Société spécialisée en phytoépuration - Bureau d'étude en franchise et d'installateurs spécialisés http://www.aquatiris.fr/phytoepuration-dessins/index.html
- fabrication de toilettes domestiques à litière biomaitrisée (TLB) : www.floreco.be
asbl Contrat de rivière Dyle-Gette - Zoning industriel, rue des Andains, 3 à 1360 Perwez - 081/24 00 40 - contrat.riviere(at)crdg.be